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Paris - Compte-rendu : Flop pour Ferrari aux Champs-Elysées
Nous y allions curieux et en confiance, ce concert ayant été précédé d'une
presse très élogieuse ; donné à Beaune, sous la direction de Jérémie Rhorer, en
juillet dernier, cet Orphée et Eurydice qui devait être tenu à l'origine par le
ténor finlandais Topi Lehtipuu, avait finalement été confié au jeune Stefano
Ferrari, accueilli comme une révélation. Quelques mois plus tard au Théâtre des
Champs-Elysées, Jérémie Rhorer, entre deux représentations lyonnaises de La
Clemenza di Tito de Mozart, est toujours au pupitre et dirige avec une énergie
bondissante cette version dite "de Paris" réalisée en 1774, à l'intention du
ténor Joseph Legros.
Geste clair et corps fougueux, Rhorer mène ses musiciens du Cercle de
l'Harmonie avec conviction, dans un style respectueux de la déclamation,
soucieux du déroulement du drame et de ses incessants changements d’atmosphère.
Larmes, espoir, terreur et désolation épousent chacun des pas d'Orphée, soumis
aux pires souffrances avant de pouvoir reconquérir sa bien-aimée. L'orchestre
gronde, les instruments piaffent, les couleurs cinglent selon les besoins d'une
partition richement détaillée et d'une grande virtuosité, qu'il s'agisse de
dépeindre la noirceur des Enfers (acte 2), la sérénité des Champs-Elysées (acte
2), ou les aspérités de l'Hadès (acte 3).
Et Orphée dans tout cela ? Timbre ingrat, fort accent transalpin, aigu étranglé
et justesse approximative ; Stefano Ferrari nous a constamment mis au supplice.
Après Rockwell Blake (à Bordeaux), Richard Croft (avec Minkowski pour Archiv) et
Juan-Diego Florez (à Madrid la saison passée), avec des moyens et des approches
différentes, nous n'imaginions pas qu'un ténor puisse à ce point se fourvoyer de
cette manière. Incapable d'émouvoir, ou de toucher, il ne sait ni vocaliser
("L'espoir renait dans mon âme" est un festival de notes savonnées et
d'accélération mal venue), ni tirer sur la corde sensible ("J'ai perdu mon
Eurydice" est coincé dans la gorge sans une l’once d'une expression), le public
consterné préférant garder le silence à l'issue de ces morceaux "de bravoure".
Jaillissante et fraîche comme une eau vive, la voix de Mireille Delunsch, qui
succède à Maria Riccarda Wesseling, est une bénédiction, conférant à Eurydice
tout son charme et sa pureté, tandis que Julia Novikova peine à restituer les
facéties d'Amour, en raison d'un diapason trop bas. Belle et ardente présence du
Choeur de chambre Les Eléments.
François Lesueur
Théâtre des Champs-Elysées, Gluck, Orphée et Eurydice, 24 octobre 2008.
Programme détaillé du Théâtre des Champs-Elysées
Photo : DR
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