On n’est pas près d’oublier la 4ème Symphonie de Mahler dirigée, à Pleyel, par Jean-Claude Casadesus (photo) à la tête de son Orchestre National de Lille. Dans une clarté faite de transparence tranquille, le maestro a, en effet, livrée une conception d’ensemble irréfutable dans sa construction comme dans sa réalisation musicale. En vrai grand chef qu’il est, il a révélé à un auditoire particulièrement nombreux un visage rare du compositeur autrichien. Gustav Mahler a 40 ans, il est au fait de sa puissance à l’Opéra de Vienne dont il domine la vie musicale et artistique, lorsqu’il compose cette symphonie, juste au passage d’un siècle à l’autre. Mahler est tout à la joie de retrouver sa veine créatrice après ses derniers accidents de santé. Toute angoisse de la mort y est suspendue.

Si l’interprétation de Casadesus est décantée et merveilleusement maîtrisée, elle n’est jamais distanciée. L’atmosphère est bucolique, mais toute frémissante parfois de tensions secrètes qui parcourent les deux premiers mouvements comme des ombres discrètes. Ce que le chef obtient de ses musiciens dans le 3ème mouvement tient du miracle : tout y est si juste qu’il y installe une sorte d’apesanteur qui aboutit naturellement à la voix qui tombe du ciel dans le finale. Cette voix d’ange, au demeurant parfaitement incompréhensible dans la langue de Goethe ce qui ajoute encore à son mystère, est celle de la jeune soprano flamande Ilse Eerens.

Il faut souligner l’homogénéité de la phalange lilloise, largement rajeunie, et en particulier la qualité de son quatuor qui pourrait faire rougir certains orchestres parisiens ! En première partie, elle avait accompagné avec beaucoup de tact un joli trio de solistes français dans le Triple Concerto de Beethoven. C’est le violoncelle de Marc Coppey au timbre si proche de celui de Casals, qui a mené la partie aux côtés d’Olivier Charlier au violon et de Claire Marie Le Gay au clavier. Une soirée marquée au sceau de la jeunesse.

Jacques Doucelin

Salle Pleyel, le 23 octobre 2007

Programmation de la Salle Pleyel

Photo : DR