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Paris - Compte-rendu - L'actualité de Leonard Bernstein - Yutaka Sado et l’Orchestre Lamoureux
Les grands créateurs sont toujours en avance sur leur temps. Celui de Leonard Bernstein compositeur semble venu avec la crise actuelle du capitalisme des deux côtés de l'Atlantique. Je ne parle pas de ses comédies musicales qui ne se sont toujours pas démodées depuis la guerre, mais de ses compositions les plus personnelles, les plus originales qui elles ont eu quelque mal à se frayer un chemin vers le public dit classique. C'est bien pourquoi le dernier concert des Lamoureux dirigés par leur chef principal depuis 1993 Yutaka Sado (photo) est à marquer d'une pierre blanche.
La 2e Symphonie de Lenny, dite Le Temps de l'angoisse d'après un poème de W H Auden qui inspira également Benjamin Britten, est en effet d'actualité. Yutaka Sado s'y est montré d'une fidélité absolue à la mémoire de son maître Bernstein dont il n'a pas seulement recueilli l'héritage de chef d'orchestre charismatique, mais dont il se montre aussi le fils spirituel. L'orchestre a accompli un magnifique travail qui a trouvé son accomplissement dans la complicité avec un musicien hors norme, transfrontalier, naviguant comme personne entre solennité classique et liberté jazzy, le pianiste Bruno Fontaine: quel musicien, tout simplement, dont Bernstein aurait aimé le jeu chaleureux, engagé, chantant et rugueux à la fois, à l'instar du public qui emplissait le Théâtre des Champs-Elysées et qui lui a fait fête. Un très grand moment de musique dans lequel les musiciens de Lamoureux retrouvèrent leur tradition de serviteurs de la musique moderne.
On peut comprendre après cet effort couronné d'enthousiasme, qu'ils aient eu sans doute moins de répétitions à consacrer à la 4e Symphonie de Tchaïkovski... Cela explique, en tout cas, une relative prudence des archets dans toute la première partie. Mais Yutaka Sado ne part jamais battu, même s'il sait faire la part du feu ! Après les pizzicati obstinés du Scherzo, il mit le feu à son orchestre, comme il sait si bien le faire, dans un Finale qui allège la soirée et vous laisse sortir du concert sur un petit nuage. C'est aussi cela un très grand chef.
Jacques Doucelin
Paris, Théâtre des Champs-Elysées, le 22 mars 2009
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Photo : DR
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