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Philippe Bianconi en récital à la salle Gaveau – Un magicien pour Ravel – Compte-rendu
Philippe Bianconi en récital à la salle Gaveau – Un magicien pour Ravel – Compte-rendu
Brahms, Schumann et Ravel : trois compagnons de longue date au programme du récital que Philippe Bianconi donne à la salle Gaveau à l’occasion de la sortie de sa magnifique intégrale Ravel (chez La Dolce Volta).
Les deux Rhapsodies op. 79 du premier ouvrent la soirée. Un Brahms que l’interprète aime profondément (le diptyque figurait déjà en tête d’un récital en avril 2011 au théâtre des Champs-Elysées) et sait restituer dans toute sa complexité. Il est fréquent d'entendre ces pièces emportées dans un mouvement bravache – et réducteur – qui en néglige bien des beautés. L’élan sombre et farouche est bien présent sous les doigts de Bianconi – un somptueux CFX Yamaha Nouvelle Génération lui permet de le restituer pleinement – mais il saisit tout autant la complexité d’un compositeur « nel mezzo del cammin » (1879), assidûment fréquenté depuis le début de sa carrière.
Vieille connaissance aussi que le Carnaval de Schumann, partition que le pianiste retrouve une fois de plus avec un bonheur visible. Energie, couleurs, impatience : on a souvent entendu Bianconi dans cet Opus 9, mais sans doute jamais aussi ouvertement libre (il ose par exemple totalement le rubato de Chopin), traduisant de la plus attachante façon l’inspiration débordante, la jeunesse d’une musique qu’il restitue dans son étourdissante variété et son lyrisme ardent. Et jamais il ne perd de vue l’organisation d’une partition très cryptée – ASCH ...
Admirable serviteur du mystère debussyste (ses enregistrements des Préludes, des Etudes et des extraits du Martyre l'illustrent), Bianconi l’est tout autant de la magie ravélienne. Les Valses nobles et sentimentales qu’il offre au public de Gaveau sont un pur miracle, appuyé sur un art de la pédalisation d’un raffinement à couper le souffle. Rien d'acidulé ni de coupant dans son approche. Sans aucunement les affadir, il parvient à adoucir les harmonies, pour les restituer avec une incroyable sensualité. Quant à l’ultime épisode, la récapitulation thématique à laquelle procède le compositeur parvient à un rare degré de féerie. Ravel a trouvé son magicien ...
Là comme dans Gaspard de la nuit. « Trois poèmes pour piano d’après Aloysius Bertrand » : d’évidence Bianconi a longuement médité le sous-titre d’un ouvrage souvent dévoyé par des virtuoses en manque d’effets. Jamais la technique ne se montre sous les doigts d’un pur alchimiste des timbres – quel athanor ce Yamaha, on le redit – qui tire des couleurs inouïes d’une Ondine au galbe parfait. Après l’hypnotique et glaçante immobilité du Gibet, Scarbo fuit tout tape-à-l’œil au profit d’une mobilité et d’une élasticité de la phrase qui font résonner le rire bourdonnant et le grincement d’ongle du gnome. Avec une terrible exactitude poétique.
La lumière revient au moment des bis : de miroitants et immatériels Jeux d’eau et une Alborada racée précèdent le quatre mains avec Clément Lefebvre (Philippe Bianconi a enregistré en sa compagnie un Ma Mère l’Oye d’une onirique tendresse). Quand deux ravéliens s’assemblent ... Le Jardin féerique et Les Entretiens de la Belle et de la Bête : la magie jusqu’au bout.
Alain Cochard
Les deux Rhapsodies op. 79 du premier ouvrent la soirée. Un Brahms que l’interprète aime profondément (le diptyque figurait déjà en tête d’un récital en avril 2011 au théâtre des Champs-Elysées) et sait restituer dans toute sa complexité. Il est fréquent d'entendre ces pièces emportées dans un mouvement bravache – et réducteur – qui en néglige bien des beautés. L’élan sombre et farouche est bien présent sous les doigts de Bianconi – un somptueux CFX Yamaha Nouvelle Génération lui permet de le restituer pleinement – mais il saisit tout autant la complexité d’un compositeur « nel mezzo del cammin » (1879), assidûment fréquenté depuis le début de sa carrière.
Vieille connaissance aussi que le Carnaval de Schumann, partition que le pianiste retrouve une fois de plus avec un bonheur visible. Energie, couleurs, impatience : on a souvent entendu Bianconi dans cet Opus 9, mais sans doute jamais aussi ouvertement libre (il ose par exemple totalement le rubato de Chopin), traduisant de la plus attachante façon l’inspiration débordante, la jeunesse d’une musique qu’il restitue dans son étourdissante variété et son lyrisme ardent. Et jamais il ne perd de vue l’organisation d’une partition très cryptée – ASCH ...
Admirable serviteur du mystère debussyste (ses enregistrements des Préludes, des Etudes et des extraits du Martyre l'illustrent), Bianconi l’est tout autant de la magie ravélienne. Les Valses nobles et sentimentales qu’il offre au public de Gaveau sont un pur miracle, appuyé sur un art de la pédalisation d’un raffinement à couper le souffle. Rien d'acidulé ni de coupant dans son approche. Sans aucunement les affadir, il parvient à adoucir les harmonies, pour les restituer avec une incroyable sensualité. Quant à l’ultime épisode, la récapitulation thématique à laquelle procède le compositeur parvient à un rare degré de féerie. Ravel a trouvé son magicien ...
Là comme dans Gaspard de la nuit. « Trois poèmes pour piano d’après Aloysius Bertrand » : d’évidence Bianconi a longuement médité le sous-titre d’un ouvrage souvent dévoyé par des virtuoses en manque d’effets. Jamais la technique ne se montre sous les doigts d’un pur alchimiste des timbres – quel athanor ce Yamaha, on le redit – qui tire des couleurs inouïes d’une Ondine au galbe parfait. Après l’hypnotique et glaçante immobilité du Gibet, Scarbo fuit tout tape-à-l’œil au profit d’une mobilité et d’une élasticité de la phrase qui font résonner le rire bourdonnant et le grincement d’ongle du gnome. Avec une terrible exactitude poétique.
La lumière revient au moment des bis : de miroitants et immatériels Jeux d’eau et une Alborada racée précèdent le quatre mains avec Clément Lefebvre (Philippe Bianconi a enregistré en sa compagnie un Ma Mère l’Oye d’une onirique tendresse). Quand deux ravéliens s’assemblent ... Le Jardin féerique et Les Entretiens de la Belle et de la Bête : la magie jusqu’au bout.
Alain Cochard
Paris, Salle Gaveau, 5 octobre 2023
Photo © Lyodoh Kaneko
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