Paavo Järvi ne ménage guère sa monture. Le programme dense qu’il propose Salle Pleyel à la tête de l’Orchestre de Paris en donne l’illustration. En ouverture, la Symphonie n°85 de « La Reine de France » de Haydn, qui constitue un véritable challenge pour les musiciens tant l’oeuvre demande équilibre, justesse de ton et de style, alacrité. Interprétation parfaite, pleine d’élan et roborative sous la conduite d’un chef nerveux, précis, soucieux de la ligne (Presto final enlevé avec une liberté très contrôlée).

Dans le Concerto n°1 en ré mineur de Brahms, Radu Lupu choisit délibérément la méditation et l’intériorité. Le torrent de lave juvénile (Maestoso initial) fait place à une austérité d’une grandeur impressionnante atténuée par une sonorité délicate et subtile.
L’Adagio est un moment de rêve en apnée où le soliste se retire sur l’Aventin, distillant une poésie quasi cosmique. La réalisation technique n’est pas parfaite (parfois l’interprète s’égare) mais l’Allegro ma non troppo final, gorgé de couleurs et de nuances, est secondé par un orchestre en pleine possession de ses moyens. En bis, l’Intermezzo op 117 n°1 de Brahms, témoigne d’une retenue crépusculaire répondant parfaitement à ce que l’on attend de ces berceuses de la douleur. Un succès public à la hauteur de l’inspiration de l’interprète.

La Quatrième Symphonie de Brahms apporte un changement de climat par le souci constant de Järvi d’impulser un rythme allant où la netteté des attaques l’emporte parfois sur la fluidité du discours. Conception plus intellectuelle que sensible mais qui met en lumière toute la complexité de l’écriture brahmsienne et permet en même temps de mesurer l’osmose établie entre l’orchestre et son directeur musical.

Michel Le Naour

Paris, Salle Pleyel, 4 avril 2012

> Programme détaillé et réservations à la Salle Pleyel

> Vous souhaitez répondre à l’auteur de cet article ?

> Lire les autres articles de Michel Le Naour

Photo : DR