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Street Scene de Kurt Weil au Châtelet - Scène avec orchestre - Compte-rendu
Un écueil : la présence de l’orchestre en scène, occupant l’essentiel du décor et ne laissant aux chanteurs que l’avant-scène, une mince galerie d’étage, deux escaliers frontaux et deux autres latéraux. Si l’on comprend bien l’efficacité du dispositif pour un spectacle qui doit tourner même dans des théâtres sans fosse, voir cette production dans le cadre idéal du Châtelet aurait dû permettre de remettre l’orchestre à sa place ; la mise en scène vive et déliée de John Fulljames en aurait tiré profit pour exposer plus finement les personnages et ne pas les abandonner parfois à la caricature un peu facile où les contraint le livret d’Elmer Rice, tel le vieux M. Kaplan, juif bolchévique qui est comme le portrait charge de Kurt Weill lui-même.
Même avec ses faiblesses (en fait Street Scene est une étape de plus vers l’opéra américain, pourtant moins réussi que Porgy and Bess), l’œuvre est absolument attachante et fait encore la part belle au génie mélodique de Weill même si la fantaisie des comédies musicales antécédentes (on pense surtout a A Touch of Venus) est grevée par la noirceur du sujet.
On se consolait de cette mise en scène imparfaite dérangée sans cesse par l’omniprésence du chef d’orchestre, focale rédhibitoire au centre exact du plateau (on ne voit littéralement que lui d’un bout à l’autre de la soirée) avec une troupe formidable.
Peu importe que Geof Dolton traîne son chant, un seul mot de dialogue parlé de son baryton profond et voila les tortures et les douleurs de Frank Maurrant mises à nu. Peu importe également le timbre sans charme de Paul Curievici, son Sam Kaplan idéaliste et timide à la fois est finement vu. La palme à Valery McCarthy, Anna volontaire au soprano éclatant, et au baryton-basse mordant de Paul Reeves, Carl Olsen séducteur en diable, mais surtout aux enfants pour leur enthousiasmante scène du II, où le petit Willie Maurrant se délure en imitant une poule de luxe (Pablo Cano Carciofa, irrésistible).
Si on a trop vu les musiciens de l’Orchestre Pasdeloup, dirigés par Tim Murray, on leur sait gré pour l’exactitude de leur lecture sans appui, élégante, rapide, portant aussi bien le drame que les numéros dansés : le jitterbug de Mae et de Dick valait le détour !
Jean-Charles Hoffelé
Kurt Weill : Street Scene - Paris, Théâtre du Châtelet, le 31 janvier 2013 www.chatelet-theatre.com
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Photo : Young Vic Theatre © Alastair Muir
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