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Trois questions à Jean-Marc Aymes, directeur du festival Mars en Baroque de Marseille - Les sons et les saveurs

Directeur artistique du Festival depuis 2007, Jean Marc Aymes, le claveciniste narbonnais amoureux de Marseille depuis qu’il en explore la diversité, est un gourmand, et si son ensemble est le Concerto Soave, son Festival se veut fine bouche tant par la fusion des lieux, des musiques, des répertoires, que par l’intrusion réelle de saveurs culinaires au sein de certains concerts. L’entendre proposer le menu est donc un festin annoncé. Musiques subtiles, raretés exquises, le maître mot est ici plaisir.
 
Dans votre festival, chef a de multiples sens ?
 
Jean-Marc AYMES : Absolument car nous nous sommes associés à des chefs marseillais, notamment pour un grand banquet le 29 mars dont le déroulement sera en quelque sorte scénographié, entre musique et mets ! Le Festival débutant le 7 sur la Conversione di Maria Maddalena de Bononcini, à l’Abbaye de Saint-Victor, avec le Concerto Soave sous ma direction et Maria Christina Kiehr, grande prêtresse du genre, une madeleine a même été créée spécialement pour l’occasion. De toute façon, puisque le festival court sur de multiples scènes, c’est le lieu qui a dirigé le choix des programmes. A l’origine, c’est Mireille Garcia, chanteuse du groupe de Musicatreize, qui  l’avait créé. Elle était, soit dit en passant, la chanteuse préférée de Maurice Ohana. Puis elle m’a passé le relais en 2007.
 
Outre la grande richesse de votre programmation musicale, le festival comporte un aspect visuel non négligeable ?
 
J-M A. J’ai tenté de jouer sur de plusieurs tableaux, pour en faire une séquence débordante de vie. Ainsi, pour la rétrospective Peter Greenaway - six films -, pour l’extraordinaire L’Autre Monde ou les Etats et empires de la Lune, tels que Benjamin Lazar le restitue au Théâtre de La Criée, étoffé d’une conférence, et pour les moments musicaux et gourmands groupés sous l’appellation "La Vie de Château", au Château Borély. Ce cadre merveilleux vaut d’être redécouvert, d’autant que l’année 2013, si importante pour la vie culturelle de Marseille, a permis aux Musées d’y redorer leur blason. La visite des riches collections du château-musée sera donc entrecoupée de plusieurs petits concerts, et de pauses gourmandes. Très importante à mes yeux également, une présentation sans précédent : celle du film réalisé par Serena Nono, fille de Luigi, sur la tragédie de Simone Weil, Venezia salva, qui conte comment la Sérénissime échappa à la tentative des espagnols pour la ravager en 1618. Serena a utilisé des enregistrements du Concerto Soave comme support de son film.
 
Quels sont les temps forts, sur le plan musical strict ?
 
J.-M. A. Outre de grands classiques, Bach, Vivaldi, Charpentier et Telemann en premier, avec la Petite Bande, dirigée par Benjamin Alard, l’Ensemble Opera da Camera di Venezia, et Les Passions, dirigées par Jean-Marc Andrieu, il y a quelques joyaux à mettre en lumière: le jeune ensemble Abchordis, installé à Bologne, a reconstitué en un florilège de pièces diverses, des Vêpres comme on pouvait les entendre du temps du Padre Martini, mais aussi des illustres inconnus Perti et Colonna. Et outre la Marie Madeleine  de Bononcini que j’ai déjà mentionnée, la Dafne de Marco da Gagliano, résurgence haute en couleur, et tout à fait païenne, de ces fêtes mantouanes qui font rêver. Dafne, écrite en 1608, est en fait le quatrième opéra connu de l’histoire. Enfin, théâtrales et infiniment poétiques celles- là, des pièces de Purcell et Lawes, jouées par l’ensemble La Rêveuse, dont la virtuosité n’exclut pas l’extrême délicatesse. Des univers multiples, donc, qui doivent permettre à chacun de trouver son miel.
 
Propos recueillis par Jacqueline Thuilleux, le 28 janvier 2014
 
Marseille, Festival Mars en baroque
 Du 7 au 29 mars 2014
Marseille - Lieux divers
www.marsenbaroque.com
 
Photo © Eve Brouet

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