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Une interview de Jean-Christophe Frisch – L’Ensemble XVIII-21 en résidence à Meudon
Le nomadisme, le voyage sont l’essence même du projet artistique de l’Ensemble XVIII-21. Baroque nomade : sous l’impulsion de directeur artistique, Jean Christophe Frisch (photo), la formation n’aime rien tant que partir à la rencontre des musiques extra-européennes, savantes ou populaires. Le spectacle « Eloge de la Folie » montre une autre manière de s’aventurer sur des terres étranges, inconnues. Il marque aussi le commencement pour XVIII-21 d’une résidence de trois ans à Meudon. Un projet riche de stimulantes perspectives que détaille Jean-Christophe Frisch.
Comment s’est mise en place la résidence de l’Ensemble XVIII-21 à Meudon ?
Jean-Christophe FRISCH : J’avais fait la connaissance de Françoise Pointard, la directrice du Centre d’Art et de Culture de Meudon, il y a quelques années alors qu’elle occupait un poste ailleurs. Elle nous a invités pour un premier concert à Meudon il y deux ans et j’ai rencontré à cette occasion l’historien Claude Vigoureux, qui est Directeur de l’action culturelle à Meudon. Des riches discussions que j’ai pu avoir avec lui, au moment du concert puis par la suite, le projet de résidence est né peu à peu. Meudon est une ville qui a une histoire à l’époque baroque, même s’il n’y en a pas énormément de restes architecturaux. Mais on se souvient que s’y trouvait le château du Grand Dauphin. Meudon a un patrimoine : plusieurs églises avec de belles acoustiques, le Centre d’Art et de Culture, dont l’acoustique est vraiment superbe, et d’autres lieux encore que cette résidence nous conduira à explorer. C’est là un cadre très adapté à une résidence d’ensemble baroque.
Quel est l’axe, le fil conducteur de votre résidence ?
J.-C. F. : Parfois les résidences n’ont de résidence que le nom, c’est tout le contraire avec ce que nous entreprenons. On y trouve plusieurs volets : d’abord des concerts sous des formes différentes, avec de petits ou de grands effectifs, dans des endroits variés. Cette saison nous nous produirons près d’une demi-douzaine de fois, ce qui permettra de renforcer la proximité avec le public. Un partenariat avec le Conservatoire de Meudon se met aussi en place : je vais diriger son orchestre et plusieurs musiciens du Baroque nomade y donneront des masterclasses. Des actions de médiation culturelle, en direction des scolaires en particulier, sont également prévues. Du point de vue musical, il nous faut construire sur trois ans quelque chose qui soit à la fois homogène et varié, afin de ne pas susciter de sentiment de lassitude chez les auditeurs. Notre travail sur des musiques de provenance très différentes (Chine, Inde, etc.) ne pourra que jouer en faveur de la variété des propositions.
Venons-en à cet « Eloge de la Folie » par lequel vous inaugurez votre résidence le 16 octobre. S’agit-il d’une création ? Quel en est le propos ?
J.C. F. : Non, nous l’avons déjà donné quatre ou cinq fois, mais il s’agit d’un spectacle récent. Il explore les liens qui existent entre la folie et la musique. Si l’on y réfléchi un instant, on constate qu’ils sont nombreux : la musique et la transe, le fou du roi musicien, les personnages de fous et de folles dans l’opéra, et en particulier dans l’opéra baroque évidemment. Ceci atteint une forme de point culminant avec Purcell et ses contemporains en Angleterre où le personnage de fou devient une sorte de lieu commun. On a même écrit des Mad songs où le personnage de Tom O’Bedlam devient une sorte d’archétype par ses sautes d’humeur, son côté imprévisible, etc.
Un lieu – dont je crains qu’il ne reste plus aujourd’hui qu’un tas de pierres - situé à Alep en Syrie a d’ailleurs été fondateur pour notre « Eloge de la Folie » : il s’agit d’un hôpital en service au XVIIe siècle où l’on enseignait la musique aux fous, non pas dans l’idée de les guérir mais celle de leur offrir une place en tant que musiciens dans la société. Cette idée est forcément fascinante pour des musiciens… Nous nous disons tous que nous sommes un peu fous ; pour monter sur scène il faut être dingue ! L’idée qu’une culture a mis la musique au cœur du positionnement social de gens « décalés » amène à réfléchir. C’est à partir de tout cela que notre « Eloge de la Folie » a été conçu.
Que découvrira-t-on durant les prochains mois à Meudon ?
J.C. F. : Nous avons imaginé un « Carnet de voyage d’un clavicorde », un programme avec flûte, clavicorde et percussions qui illustre le clavicorde comme instrument de voyage aux XVIIe et XVIIIe siècles. Je dirigerai par ailleurs l’Orchestre du Conservatoire de Meudon dans des extraits des Indes Galantes de Rameau. La Chine sera présente avec notre programme « Concert baroque à la Cité interdite ». Un spectacle inspiré par Armande Béjart est également prévu. Enfin, ce 17 octobre, la ville de Meudon a organisé en partenariat avec le département des Hauts-de-Seine, un concert hors les murs que je donne à la flûte seule au château de Sceaux : « L’incroyable et véridique histoire des voyages de Pierre-Gabriel Buffardin ». Ce programme raconte la vie de Gabriel Buffardin, flûtiste français qui a fait la connaissance à Constantinople de Johann Jacob Bach(1), frère aîné de Jean-Sébastien, et lui a donné des cours de traverso. Un Bach apprenant la flûte avec un Français à Constantinople : la chose est pour le moins cocasse !
Propos recueillis par Alain Cochard, le 26 septembre 2014
(1) Pierre-Gabriel Buffardin : Avignon 1689 - Paris 1768
(2) Johann Jacob Bach : Eisenach 1682 - Stockholm 1722
« Eloge de la Folie »
Ensemble XVIII-21, dir. Jean-Christophe Frisch
16 octobre 2014 – 20h45
Meudon – Centre d’Art et de Culture
http://www.offi.fr/concerts/cac-1593/ensemble-xviii-21-le-baroque-nomade-dir-j-c-frisch-flute-763522.html
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« L’incroyable et véridique histoire des voyages de Pierre-Gabriel Buffardin »
Jean-Christophe Frisch, flûte(s)
17 octobre 2014 - à 19h et 21h
Sceaux - Château
http://applis.hauts-de-seine.net/publications/progMuseesHautsDeSeine/27automne2014/files/assets/basic-html/page24.html
Photo © Rakkana Poulard
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