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Valery Gergiev et L’Orchestre du Mariinsky à Pleyel - Un Chostakovitch dégraissé - Compte-rendu
N’en n’a-t-on pas entendu de ces Chostakovitch en technicolor sous couvert de Mahler russe ! C’est le mérite de ces premiers concerts du cycle symphonique et concertant voué sur deux saisons au compositeur russe par Valery Gergiev et ses troupes du Mariinsky, salle Pleyel, que de le faire entrer dans la galerie des grands musiciens slaves. Si l’on ne risquait pas d’y voir une critique, je dirais volontiers que Gergiev a dessiné un portrait très « classique » du grand ami de Rostropovitch lors de la soirée du 8 janvier. On devine qu’il tentera de donner cohérence et unité au portrait qu’il va dresser au long de cette intégrale.
Même la très soviétique et très convenue 3ème Symphonie célébrant le culte politique du « Premier Mai » s’est parée sous les mains délicates du chef d’une patine raffinée grâce à la qualité rare de l’orchestre du grand théâtre de Saint-Pétersbourg. Même traitement tout en finesse pour le Second Concerto pour violoncelle qui du coup en deviendrait presque fade ; surtout que le soliste italien Mario Brunello tire l’oeuvre du côté de la musique de chambre, tout à l’inverse du lyrisme échevelé de son créateur Mstislav Rostropovitch ou de sa disciple Natalia Gutman !
C’est l’autre visage de Chostakovitch, celui de l’homme révolté en butte aux mensonges et aux pressions du régime soviétique, que célèbre la seconde partie de la soirée avec la fameuse 13ème Symphonie, dite « Babi Yar » d’après le poème où Evoutchenko dénonce l’assassinat de plusieurs dizaines de milliers de juifs ukrainiens dans un ravin en septembre 1941. Le magnifique chœur d’hommes comme la superbe basse Mikhail Petrenko mettent simplement le texte en valeur sans aucune emphase à l’instar d’un orchestre qui n’en rajoute jamais, conduit du bout de ses doigts nerveux par un chef fidèle à la seule partition.
Loin du post-romantisme mahlérien, Gergiev s’inscrit davantage dans la grande tradition russe. Ce faisant, il y retrouve l’inspiration du Schoenberg du Survivant de Varsovie comme du Britten du War Requiem. La symphonie y gagne en unité et en prégnance.
Jacques Doucelin
Paris, Salle Pleyel, 8 janvier
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Photo : DR
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