Journal
Trois romantiques français oubliés
Berlioz, Saint-Saëns ou Bizet, tels sont les noms venant à l'esprit lorsque l'on parle de musique romantique française. Dans sa diversité, l'histoire renferme bien d'autres trésors méconnus et peu joués aujourd'hui, qui méritent pourtant d'être savourés. Les compositions d'Étienne-Nicolas Méhul, de Félicien David ou de Théodore Dubois nous éclairent sur la diversité du répertoire français au XIXe siècle.
Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817), le révolutionnaire
Étienne-Nicolas naît dans les Ardennes et s'installe à Paris à 16 ans. La cause révolutionnaire portera le jeune compositeur, qui écrit notamment le Chant du Départ, sa pièce la plus célèbre aujourd’hui. Très abondante, la production lyrique de Méhul fait entendre les prémices du grand opéra romantique : son orchestre exalte les sentiments et les situations. Dans Uthal, les violons sont supprimés afin d'accentuer la couleur sombre et mélancolique de cet opéra en un acte. L’ouverture du Jeune Henri préfigure pour sa part un genre cher au XIXe siècle : le poème symphonique. Les symphonies de Méhul, d'un style véhément et héroïque, riches de contrastes et d'innovations rythmiques aux accents pré-beethoveniens, constituent un fleuron du romantisme naissant. Méhul offre à la France une musique virile, mais qui sait également tendre vers l’élégance et la légèreté. Premier musicien décoré de la Légion d'Honneur (avec ses collègues Gossec et Grétry) par Napoléon dès la création de l’Ordre, Méhul était l'un des compositeurs préférés de l'Empereur. Emporté par la tuberculose à l'âge de 54 ans, il laisse des partitions qui marqueront des auteurs tels que Mendelssohn, Schumann et Berlioz.
Félicien David (1810-1876), l'orientaliste
Quelques années plus tard, ce sont des mélodies plus douces et orientalisantes qui arrivent aux oreilles des Parisiens grâce à Félicien David. Né en Provence, il s’installe à Paris afin de se former au Conservatoire, études assez vite abandonnées pour rejoindre le mouvement saint-simonien. Le musicien y composera de nombreuses pièces chorales, dont un Hymne à Saint-Simon. À la dissolution de la confrérie, il entreprend un voyage au Proche-Orient (1833-1835) qui le mène jusqu’en Egypte. Il en rapportera des Mélodies orientales pour voix et piano, ainsi que l'inspiration pour ses premiers succès. David excelle et innove dans les compositions vocales, notamment par l'invention de l'ode-symphonie, longue pièce alternant séquences symphoniques, solistes et chorales ainsi que déclamation de textes en vers. Le Désert (1844), premier opus du genre, vaut à Félicien David l'admiration de ses contemporains - « un chef-d’œuvre », s’exclame Berlioz ! C'est avec Lalla-Roukh (1862), son troisième opéra, que l’artiste parvient à la gloire populaire et académique – il succède à Berlioz à l'Institut en 1869.
Théodore Dubois (1837-1924), l'académique
Théodore Dubois sera reconnu par ses pairs dès le début de sa carrière. Débutant son apprentissage de l'orgue à la cathédrale de Reims, il est par la suite admis au Conservatoire de Paris. En 1861, sa cantate Atala lui vaut le Grand Prix de Rome, suivi d’un séjour dans la ville éternelle. Porté par le franc succès de l’oratorio Les Sept Paroles du Christ (1867) – une partition encore jouée de nos jours pendant de la Semaine sainte aux Etats-Unis ! –, le musicien devient maître de chapelle à la Madeleine en 1868 (en 1877 il succédera à Saint-Saëns à la tribune de cette église), puis professeur d’harmonie au Conservatoire de Paris en 1871, institution qu’il dirige de 1896 à 1905. Auteur d’une abondante production symphonique et chambriste, Dubois s’est aussi illustré aussi dans le domaine choral, profane et sacré, sans oublier la mélodie. Sa musique fait résonner les dernières notes de l’école romantique française de la fin du XIXe siècle, avant que Debussy et Ravel notamment ne viennent en renouveler les code.
> Pour en savoir plus, lire le dossier des Archives du siècle romantique
> Lire également Les pires premières de l'histoire de la musique
Derniers articles
-
19 Décembre 2024Jacqueline THUILLEUX
-
17 Décembre 2024Alain COCHARD
-
16 Décembre 2024Jacqueline THUILLEUX