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Les P’tites Michu d’André Messager au théâtre de l’Athénée – Rose et joyeux

Elles arrivent ! Après Nantes, dans leur version avec orchestre, puis au Perreux, où a été étrennée (1) – avec un très beau succès  – une mouture pour 12 instrumentistes de Thibaud Perrine, Les P’tites Michu d'André Messager (dans la mise en scène de Rémy Barché avec la compagnie Les Brigands) débarquent sur la scène de l’Athénée pour sept représentations : joyeuse conclusion du 6ème Festival Bru Zane à Paris.

© Coll. part.

Reconnaissance populaire : André Messager parmi les musiciens de la collection Félix Potin © DR

Les P’tites Michu comptent parmi les très grands succès de Messager (1853-1929) à tel point que, dix ans après leur création parisienne (le mardi 16 novembre 1897), The Little Michus furent données au Garden Theatre de Broadway, point de départ d'une grande tournée américaine. Séduit par la gaité du livret de Vanloo et Duval, Messager n’avait pas hésité un instant : en l’espace de trois mois, sa partition fut achevée. « Le livret, note Christophe Mirambeau dans un livre désormais incontournable pour qui s’intéresse au compositeur français (2), fort gentil, est très habilement troussé à la manière d’un opéra-comique ancienne manière – celle des Boieldieu, Adam ou Auber –, une parfaite « pièce morale où les mamans pourront conduire leurs fillettes [selon La Vie théâtrale du 10 décembre 1897]. » »

Vraiment rien de scabreux en effet dans cette histoire où l’une des jumelles Michu se révèle être la fille d’un général, le Marquis des Ifs qui, son épouse étant décédée en couches, avait confié le bébé au couple Michu – où Madame venait elle aussi de mettre au monde une fille – et avait pris la fuite, poursuivi qu’il était par les révolutionnaires de 1793. Rien ne se ressemble plus que deux bébés rose dans l’eau savonneuse d’une baignoire ... Mais dix-sept ans plus tard, qui est qui ?
Livret fort gentil, certes. Reste que l’art de Messager – musicien "spirituellement savant", comme l'a justement dit un commentateur de l'époque –, son génie mélodique font la différence ; 172 représentations suivirent la première aux Bouffes Parisiens et l'ouvrage franchit sans tarder les frontières pour aller réjouir les publics allemand et suisse.

© Nemo Perier Stefanovitch

Revoilà donc les P’tites Michu cent vingt ans après leur création ! On est allé goûter au spectacle l’autre jour au Perreux : une pleine réussite qui, d’évidence, fera merveille dans la bonbonnière de l’Athénée. Atmosphère colorée, rose et bleu, avec un décor unique et malin de Salma Bordes (s’y ajoutent les vidéos de Stéphane Bordonaro et les non moins sympathiques costumes d’Oria Steenkiste) et le piment « brigandesque » qui, une fois de plus, produit ses savoureux effets sur un répertoire qui ne demande qu'à être réveillé avec intelligence.

Aucune chute de tension au cours d’un spectacle rondement mené par une équipe de chanteurs comédiens rompus à l’opérette : Violette Polchi (Marie-Blanche) et Anne-Aurore Cochet (Blanche-Marie), parfaites de piquant et de fraîcheur, Damien Bigourdan et Marie Lenormand pour un couple Michu hautement... pittoresque !, Caroline Meng (Mlle Herpin) parfaite directrice de pensionnat, Boris Grappe Général haut en couleur, Gaston attachant de Philippe Estèphe, Aristide gentiment benêt de d’Artavazd Sagsyan et Bagnolet impayable, entre obséquiosité et hystérie, de Romain Dayez. Tous les caractères de l’ouvrage sont parfaitement dessinés dans une mise en scène efficace et bien réglée.

En fosse, Pierre Dumoussaud, dirige l’arrangement que Thibaud Perrine a concocté pour un groupe de 12 instrumentistes (2 violons, alto, violoncelle, contrebasse, flûte, hautbois, clarinette, basson, cor, cornet, percussions) : tous se révèlent en permanence à la hauteur de l’enjeu (mention spéciale pour le premier violon d’Hugues Borsarello).
Blanche-Marie ou Marie-Blanche ? Réponse à partir du 19 juin à l’Athénée. Idéal pour boucler la saison lyrique d'excellente humeur.

Alain Cochard

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(1) Le 31 mai 2018 au Centre des bords de Marne
(2) Christophe Mirambeau : « André Messager, le passeur du siècle » ( Actes Sud/ Palazzetto Bru Zane, 505 p, 13,50 €)

Messager : Les P’tites Michu
Les 19, 20, 22, 25, 25, 26, 27 & 29 juin 2018
Paris – Athénée Théâtre Louis-Jouvet
www.concertclassic.com/concert/les-ptites-michu

Photo © Nemo Perier Stefanovitch

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