Journal
Irma la douce à l’Odéon de Marseille – Tapin gagnant – Compte-rendu
A Marseille, en haut de la Canebière, l’Odéon est l’une des dernières places fortes de l’opérette en France, proposant une saison où les découvertes alternent avec les pièces plus connues. Ainsi, après Le Petit Faust d’Hervé et en attendant La Grande duchesse de Gérolstein (1), c’est Irma la douce, la comédie musicale de Marguerite Monnot, qui était à l’affiche pour deux représentations. L’occasion pour nombre de spectateurs d’apprécier pour la première fois sur scène cette œuvre popularisée à l’écran, en 1963, par le film de Billy Wilder. Un tournage effectué après le succès incontestable de cette comédie musicale donnée près de 1000 fois à Paris dans la foulée de sa création, en 1956, avec Colette Renard dans le rôle titre et autant de fois à Londres, où Peter Brook signa sa mise en scène, et à New-York.
Laurence Janot (Irma la douce) et Gregory Benchenafy (Nestor le fripé) © Christian Dresse.
Maurice Xiberras, le directeur général de l’Opéra de la cité phocéenne et de l’Odéon, a choisi Laurence Janot (photo, au centre) pour incarner la prostituée. Danseuse, comédienne et excellente chanteuse, la dame ne manque ni de charme(s) ni de talent(s) ; Jacques Duparc, qui signe ici une mise en scène échevelée, ne s’y est pas trompé, usant, sans abuser, de ses atouts. Au-delà de la comédie, qu’elle joue fort bien, Laurence Janot procure toute son humanité fragile à cette Irma qui, dans un univers sordide, verra s’allumer la lumière de l’espoir d’une vie meilleure avec l’amour réciproque naissant entre elle et Nestor le fripé. Le tout sous l’œil de quelques personnages hauts en couleurs, tenancier de bar, maquereaux et autres demoiselles de petite vertu. Mais revenons à Nestor le fripé qui n’est autre que Grégory Benchenafi, beau gosse et bon comédien qui n’hésite pas à payer de sa personne, dévoilant sans aucun complexe, il peut se le permettre, la face cachée ou le côté pile de son anatomie. Et en plus il sait chanter, le bougre… Belle projection, précision, couleurs : la voix est là. Le couple qu’il forme avec Irma est idéal. Pour surveiller tout son petit monde, Jacques Duparc, le metteur en scène, s’installe derrière le comptoir du Bar des Inquiets, incarnant Bob le hotu très attentionné envers sa Gigi la loco, la tenancière, à qui l’irrésistible Cécile Galois offre ses traits et sa voix.
L’une des scènes délirantes de cette production, celle du procès de Nestor le fripé. Ici, le Président du tribunal (Florian Cléret), entouré des danseuses et danseurs de la production, Laetitia Antonin, Anne-Lise Thebault, Loïc Consalvo et Rémi Kouadio © Christian Dresse.
Puis il y a les macs : Polyte le mou, Jojo les yeux sales, Roberto les diams, Bébert la méthode, Léo le corbeau, Dudu la syntaxe, soit, dans l’ordre précité : Francis Dudziak, Jacques Lemaire, Grégory Juppin, Florian Cléret, Jean-Claude Calon et Jean Goltier. Une joyeuse troupe qui se prête avec bonheur aux facéties requises par le metteur en scène pour proposer quelques moments d’anthologie comme le désopilant procès de Nestor le frisé ou la naissance des jumeaux d’Irma saluée par les mêmes grimés… en Rois mages ! Entre jardin et cour, ça joue, ça chante, ça bouge… Et ça plait ! Quant à la musique de Marguerite Monnot servie par les claviers de Christian et André Mornet, par les accordéons de Norbert Donadei et Sylvie Mornet, par la contrebasse de Michel Prats et la batterie de Jean-Claude Vernet, elle n’a pas pris une ride et se laisse savourer, déroulant quelques tubes intemporels que l’on fredonne dans la salle : « Mon homme », « Pigalle », « Sous les ponts de Paris »… Alors, tout compte fait, Irma la douce, délaissant un temps le Pont de Caulaincourt, a bien fait de venir « travailler » sur l’avenue « qui fait le tour de la terre ». Pour elle ce fut tapin gagnant !
Michel Egea
(1) les 25 et 26 mai // odeon.marseille.fr/programmation/operette/la-grande-duchesse-de-gerolstein
M. Monnot : Irma la douce – Marseille, L’Odéon, 27 avril 2019 // odeon.marseille.fr /
Photo © Christian Dresse
Derniers articles
-
21 Décembre 2024Jacqueline THUILLEUX
-
19 Décembre 2024Jacqueline THUILLEUX
-
17 Décembre 2024Alain COCHARD