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The Importance of Being Earnest de Gerald Barry en création parisienne au Théâtre de l’Athénée - Folie réglée - Compte-rendu

Cheminant toujours hors des sentiers piétinés, le Théâtre de l’Athénée présente The Importance of Being Earnest. Cet opéra-comique composé par Gerald Barry (né en 1952) a été créé en version de concert en 2011 par l’Orchestre de Los Angeles, puis en version scénique à Nancy en 2013 (1). Le livret du compositeur réutilise en le condensant le texte de la pièce éponyme d’Oscar Wilde, L’Importance d’être Constant (selon son titre français), datée de 1895, et son sujet de personnages égarés qui s’inventent une autre vie (et à l’occasion un nom : Ernest, ou Constant dans sa version française) à travers des péripéties d’une loufoquerie empreinte de nonsense.
 
La production vient du Nouvel Opéra Fribourg en Suisse romande, où elle a été étrennée fin avril. Pour sa reprise à l’Athénée, interviennent les mêmes ingrédients, mise en scène et interprètes, dans un spectacle léché au plus haut point. Julien Chavaz, dont on avait déjà goûté Moscou Paradis en ce même théâtre (2), anime la scène de mouvements saccadés incessants, dans une chorégraphie (signée Nicole Morel) ajustée au plus près de la musique, des décors de panneaux coulissants, des costumes, des perruques, des maquillages et des lumières, le tout dans des coloris roses et verts suaves de bonbons anglais acidulés. Un joyeux délire, dans une précision millimétrée, parcourue d’une vie et d’un humour de chaque instant. Ce qui répond tout à fait l’esprit de la pièce, sa drôlerie décapante et son absurdité ravageuse.
 

© Magali Dougados
 
La musique imaginative de Barry, Irlandais tout comme Wilde, s’y accorde au mieux, avec son orchestration percutante pour petit effectif aux dominantes d’harmonie à vents (seules cinq cordes sur les vingt-et-un instruments, dont timbales, percussions et piano/célesta), ses contrepoints sonores concrets (entre électroacoustique, haut-parleurs et… jets d’assiettes), et son envol lyrique individuel ou d’ensemble. Si ce n’est que la chose ne prend sa consistance qu’après de premiers passages en parlé et parlé-chanté (opéra-comique oblige), assez peu significatifs parmi les dissonances instrumentales.
 
Les interprètes n’en sont pas moins des plus appropriés. Les huit solistes majoritairement anglophones (pour ce livret anglais) rivalisent de bagout tant vocal que scénique. On relève particulièrement le lyrisme décuplé par le chant de la soprano Alison Scherzer et de la mezzo Nina van Essen pour les deux principales protagonistes féminines (Gwendolen et Cecily). Le ténor Timur et le baryton Ed Ballard, ne sont pas en reste de jolis sons filés pour incarner les deux pauvres héros des élucubrations de l’historiette, John et Algernon alias Earnest (ou Constant). Une mention spéciale pour Graeme Danby, désopilant travelo barbu en Lady Bracknell et autoritaire basse profonde comme il se doit. Et l’on n’oublie pas le Dr Chasuble de Stephen Beard, le Lane de Vincent Casagrande et la Miss Prism de Jessica Walker, tous trois remarquables.
 
L’Orchestre de chambre fribourgeois réagit sans compter ses forces ni ménager ses effets, sous la battue acérée de Jérôme Kuhn. Magnifique retour de cet opéra de chambre, pour sa seconde apparition en France depuis six ans et sa toute première parisienne !

Prochain rendez-vous lyrique – et comique – à l'Athénée avec le méconnu Testament de la tante Caroline, opérette en un acte d'Albert Roussel qui tiendra l'affiche du 6 au 13 juin.(3)
 
Pierre-René Serna

(1) www.concertclassic.com/article/limportance-detre-constant-nancy-wilde-selon-barry-compte-rendu
 
(2) Voir notre compte-rendu :
www.concertclassic.com/article/moscou-paradis-de-chostakovitch-lathenee-tracasseries-et-divertissements-aux-temps
 
(3) www.athenee-theatre.com/saison/spectacle/le_testament_de_la_tante_caroline.htm

Gerald Barry : The Importance of Being Earnest – Paris, Théâtre de l’Athénée, 22 mai 2019
 
Photo © Magali Dougados

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