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La Grand-Duchesse de Gérolstein à l’Odéon de Marseille – La duchesse n’est pas qu’une pomme – Compte-rendu
Pour débuter l’année à l’Odéon, Maurice Xiberras, directeur général du lieu ainsi que de l’Opéra de Marseille, a choisi la Grande-Duchesse de Gérolstein. L’opéra bouffe d’Offenbach, qui triompha à Paris pendant l’Exposition universelle de 1867, fait toujours recette à juger par la fréquentation de la salle lors de la première des deux représentations.
Si elle n’a pas trouvé l’amour-passion – et ce n’est pas faute de l’avoir cherché – la grande-duchesse de Gérolstein a-t-elle trouvé la paix des sens ? Assurément non, à en juger par son œil coquin et son regard mutin au moment de donner la dernière réplique de l’ouvrage « Quand on n’a pas ce que l’on aime, il faut aimer ce que l’on a ». Une chose est certaine, la dame a beau « aimer les militaires » et le chanter haut et fort, elle ne trouvera pas son bonheur auprès de Fritz. Celui qui passera en quelques minutes de simple soldat à général en chef, promotion souhaitée canapé ou plutôt lit à baldaquin par la duchesse, restera fidèle à sa Wanda, cantinière de son état. Fritz qui passera aussi totalement à côté de la délicieuse déclaration masquée de la souveraine à son endroit. Benêt, le militaire ? On peut le craindre… Une chose est certaine, un an après Sadowa les Autrichiens ont pris pour eux la critique de l’armée mise en avant par la pièce, interdisant sa représentation à Vienne dans un premier temps avant de l’autoriser. Elle y obtiendra un grand succès !
Laurence Janot (La Grande-Duchesse) & membres du chœur de l'Opéra de Marseille © Christian Dresse.
Succès aussi à Marseille, pour cette nouvelle production programmée à l’Odéon dans une élégante mise en scène signée Yves Coudray et avec une grande-duchesse d’exception : Laurence Janot. Sur le plateau lilliputien du théâtre marseillais, Yves Coudray, par la force des choses, ne fait pas dans le XXL, mais il maîtrise totalement les déplacements et les effets de masse. La direction d’acteur est subtile et les petits détails, qui sont nombreux dans ce travail, offrent un spectacle des plus attrayants et dynamiques.
Minimalistes, les décors de Loran Martinel, carte du duché au premier acte et plans du château ensuite, sont soignés et intelligents et les costumes, sélectionnés dans les réserves de l’Opéra, à la hauteur de la mise en scène. À commencer par ceux d’une grande-duchesse dont le physique est sans cesse mis en valeur ; complément idéal d’une voix chaude et nuancée, avec des beaux graves soyeux et des aigus maîtrisés ; de la douceur et du sentiment pour un émouvant « Dites lui qu’on l’a remarqué », un côté martial bienvenu pour « Voici le sabre de mon père », de l’espièglerie pour « Ah! que j’aime les militaires », entre autres airs servis par Laurence Janot (photo à g.). Une duchesse qui est loin d’être une pomme !
Franck Leguérinel (Boum), Alfred Bironien (Paul) & Dominique Desmons (Puck) © Christian Dresse
A ses côtés, on découvre une troupe idéalement composée avec le Fritz brut de décoffrage de Pierre-Antoine Chaumien (photo à dr.), la Wanda un tantinet naïve de Julia Knecht, le général Boum has been de Franck Leguérinel, le prince Paul stupide à souhait d’Alfred Bironien, le baron Puck, manipulateur dépassé de Dominique Desmons, le baron Grog en décalage total de Jean-Christophe Born et le Népomuc rouquin et efficace d’Antoine Bonelli. Ça joue efficacement, ça chante agréablement et c’est plein d’humour de qualité. What else ?
Les membres du chœur de l’Opéra étaient réquisitionnés pour l'occasion et ont contribué grandement au succès de la représentation, tant vocalement que scéniquement. Enfin, dans la fosse, la vingtaine d’instrumentistes placés sous la direction dynamique de Jean-Christophe Keck a procuré toute sa saveur à la partition d’Offenbach. De la belle ouvrage !
La saison de l’Odéon se poursuit les 24 et 25 février, avec une nouvelle production d’une partition bien plus rare, écrite au mitan des années 1920 : Paganini de Franz Lehár (1)
Michel Egéa
(1) odeon.marseille.fr/programmation/operette/paganini
Offenbach : La Grande-Duchesse de Gérolstein – Marseille, Odéon, 13 janvier 2023
Photo © Christian Dresse
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