Remise sur le métier, La Ronde gagne indiscutablement en prégnance et en proximité. Le compositeur belge Philippe Boesmans avait voulu une pièce sans retenue ni scrupule, brassant les styles et maniant l’humour sonore pour arriver à l’aigre-drôle. Cet opéra, basé sur la pièce d’Arthur Schnitzler, avait fait couler beaucoup d’encre lors de sa création en 1993.

Retenons l’incontestable séduction sonore de ces dix tableaux dont la trame musicale pétillante et sarcastique ne se prive pas d’appels du pied au Berg de Lulu tout en libérant une veine goguenarde très « cabaret ». De fait, la coupe franche dans l’épaisseur de la texture musicale souligne adroitement cette écriture volubile aux riffs omniprésents. Si Reigen poursuit son chemin sur scène (l’opéra avait été repris à Nantes ou Braunschweig), c’est donc sa transcription qui constitue l’événement : un projet offert aux Jeunes Voix du Rhin avec la bénédiction du compositeur.

C’est Fabrizio Cassol, saxophoniste aussi actif sur la scène jazz que pour le répertoire contemporain, qui s’est chargé de cette « révision » pour vingt-deux musiciens. Philippe Boesmans ne cache pas son enthousiasme face à cette adaptation susceptible de propulser l’œuvre sur des scènes plus modestes, un encouragement à la diffusion que l’on ne peut qu’approuver, sous réserve de disposer d’un effectif instrumental mieux rôdé que l’Orchestre Ostinato, encore fébrile pour cette création mondiale. Saluons en revanche le travail des Jeunes Voix du Rhin, qui fournissent un plateau remarquable et homogène, avec une mention particulière à la jeune soprano coréenne Hye-Youn Lee – intonation précise, aigus lumineux – ainsi qu’aux mezzo-sopranos Monica Brett-Crowther et Géraldine Chauvet, dont la présence scénique constitue un atout de premier ordre.

Nicolas Baron

Colmar, Théâtre Municipal : 5, 7 et 10 mai. Mulhouse, Théâtre de la Sinne : 27 et 29 mai. Paris, Athénée-Théâtre Louis Jouvet : 8, 10, 12, 15 et 16 juin. Strasbourg, Opéra : 3 et 5 juillet.

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