Le marathon schubertien entrepris par les pianistes Christian Ivaldi et Jean-Claude Pennetier s’est conclu avec brio le 4 mars dernier, à la Salle Cortot. Ce cinquième et dernier volet de l’intégrale de l’œuvre à quatre mains a permis de découvrir des pièces très riches et pourtant rarement données en concert.

Pour débuter, Trois grandes marches D. 819 suivi d’un Allegro et andante D. 968. Certes, il s’agit d’une œuvre de jeunesse mais Ivaldi et Pennetier savent nous en faire saisir toute la saveur. L’exercice délicat du quatre mains devient pour eux un jeu d’enfant, le mode d’expression de leur complicité. Ils respirent d’un même souffle, portés par des sensations communes. Ils ne sont pas complémentaires, mais mieux que cela : ils jouent d’une seule et même voix. Cette entente quasi fraternelle, témoignant des heures et des années passées ensemble au piano, confère à leur interprétation cet esprit schubertien si rare aujourd’hui.

Pas question d’esbroufe ou de grand coup de manches mais une simplicité absolue comme dans la charmante Danse allemande D. 618 ou l’adorable Kindermarsch D. 928. Les Variations en mi mineur D. 624 conservent un caractère semblable même si certains y trouveront quelques longueurs, ces fameuses « longueurs célestes » comme on dit parfois en qualifiant les longs développements chez Schubert.

Après les Quatre polonaises D. 599, Ivaldi et Pennetier achèvent leur concert par le magnifique Divertissement hongrois D. 818. Un pur chef d’œuvre schubertien ! Dans le dernier mouvement, particulièrement inspiré ; les pianistes se font conteurs d’une histoire. Leur toucher franc et profond rend l’émotion presque palpable. Cette musique, cela pourrait être le périple d’une vie, avec ce thème hongrois qui revient à plusieurs reprises comme pour marquer les années qui passent. Ivaldi et Pennetier nous tracent une histoire simple et familière, celle de l’enfance qui s’éloigne mais dont la douceur se distille éternellement…

Nicolas Nativel

Photo : AK