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Nancy - Compte-rendu - Le maelström du Barbier de Séville
« Il restera de moi le troisième acte d’Othello, le deuxième de Guillaume Tell et tout le Barbier » a déclaré Rossini dans un élan de lucidité plutôt réducteur, preuve en est donné place Stanislas avec ce Barbier émoustillant et rafraîchissant que l’on doit au trio infernal le chef Paolo Olmi, le metteur en scène François de Carpentries et la costumière Karine van Ecke.
Cela se passe en Espagne et arrange bien Rossini et Beaumarchais qui devait se battre respectivement contre la censure italienne et Française. Dans cette production la jeunesse et l’amour triomphe sur les censeurs et les vieux barbons. Bartolo dans sa forteresse essaie en vain de retenir un joli papillon nommée Rosine, et qu’il s’est mis en tête d’épouser, c’est compter sans l’énergie amoureuse d’Almaviva et l’intelligence commerciale de Figaro qui ensemble forceront les cadenas et les grilles où le printemps s’étiolaient.
Dès les premières notes de l’ouverture tout virevolte, rage et tempête pour que la jeunesse puisse triompher. Almaviva « queue de cheval et cuissardes à la Francis Lalanne » vocalise admirablement et joue intelligemment de sa plastique de rocker, magnifique prise de rôle du jeune Sébastien Droy, encore une ou deux années de fréquentation du personnage et il pourra inclure le « cessa di piu resistere » seul coupure dans cette production qui nous donne à entendre l’intégralité de la partition.
Le Figaro du Canadien Nigel Smith « chemise hawaïenne, brillant dans l’oreille et chaîne en or » est exemplaire d’efficacité avec une voix large et souple, vocalises exécutées avec finesse et maestria. Il forme avec Almaviva un duo auquel on ne résiste pas. La salle ne s’y trompe pas qui lui fait un triomphe après son air d’entrée ainsi qu’aux rappels finaux. Autre triomphatrice de la soirée la Rosine de la jeune norvégienne Tuva Simmingsen, à la vocalita rossinienne exemplaire rien à redire dans ce beau chant fruité avec de superbes colorations et là aussi une vocalisation parfaite. Avec ce trio le chant rossinien à de beaux jours devant lui !
John Lundgren campe un Dottore tiraillé par le démon de midi qui aura beau user de toutes les serrures mises à sa disposition ne pourra empêcher l’envol final du beau papillon qu’il voulait pour lui seul. Le chef ne l’aide guère dans son air avec un tempo qui aurait demandé un peu plus de retenu et lui aurait évité l’écueil de la partie centrale, bête noire de tous les interprètes. Dommage car la voix est belle et bien conduite avec une articulation impeccable. Le Basile de Carlo Lepore fait merveille et récolte un triomphe bien mérité ; le comédien est subtil avec juste ce qu’il faut de rouerie pour déchaîner les rires du public.
L’orchestre symphonique et lyrique de Nancy sous la battue vive et alerte de Paolo Olmi brille de tous ses feux et fait entendre un tourbillon de notes qui entraîne le plateau dans un maelström ravageur.
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Nancy le 17 mai 2005. Autres représentations les 18, 20 et 22 mai.
Photo : DR.
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