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Toulouse - Compte-rendu : Don José enfin
La mise en scène de Nicolas Joël affiche ses dix ans crânement : elle n’a pas pris une ride. Béatrice Uria Monzon y retrouve ses marques pour la plus naturelle des Carmen qui soit : pour elle rien n’est écrit, elle croit d’ailleurs à peine la prédiction des cartes. Elle vit au jour le jour, sans crainte du destin, simplement tenue pas cette exigence tyrannique de la liberté. Depuis ses Didon et ses Judith, depuis qu’elle a flirté avec la tessiture de Falcon, Carmen prends dans sa voix une toute autre tension, trouve des couleurs plus rauques. Les mots sont projetés avec plus de timbres et plus d’intentions, le style aussi s’est épuré. Il serait temps qu’enfin cette Carmen parvenue à sa maturité soit de nouveau documentée au disque. Mais comme tous les spectacles du Capitole, celui-ci a été filmé…
Heureusement, car la prise de rôle de Marcelo Alvarez a tenu toutes ses promesses : Don José très au-dessus de ceux proposés par ses confrères, Roberto Alagna inclus, pour la pure beauté de l’instrument, avec juste assez de style pour excuser cette émission très latine, et un français encore à la peine dans les sections parlées. Mais l’incarnation est majeure, soufflante, et fait passer le frisson absolu du très grand opéra qui déserte trop souvent les scènes lyriques. « La fleur que tu m’avais jetée » atteint alors à une incandescence dont seul Domingo, jadis, s’était aussi rendu si délicieusement coupable.
Un Escamillo avec tous les graves et de la bravoure à revendre – Angel Ordena, avec de l’estoc dans la voix –, le Zuniga tranchant et si juste de Jérôme Varnier, des comprimari imbattables et parfaitement appariés (Ludlow, Dudziak, Do, la Frasquita aux aigus impérieux de Sophie Graf, la Mercedes sensuelle et provocante de Patricia Fernandez) entouraient un quatuor de tête que dominait la Micaela immense, grand soprano lyrico-dramatique déjà remarqué in loco en Jenufa, de Barbara Haveman, pulpeuse, intense : la voix du bon dieu.
En fosse Günter Neuhold dirige sans fantaisie et « déméditerranéise » Carmen : une erreur qu’une distribution éclatante faisait oublier.
Jean-Charles Hoffelé
Toulouse, Théâtre du Capitole, le 22 avril 2007
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Photo de Carmen (Béatrice Uria-Monzon) / Don José (Marcelo Alvarez) : Patrice Nin
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