Prenant le contre-pied du librettiste Ferretti et de Gioachino Rossini, le metteur en scène Stephan Grögler fait table rase du contenu philosophique du livret pour nous plonger dans une féerie prenant sa source chez Perrault et les frères Grimm. La chambre d’Angelina se situe dans une forêt enchantée, habitée par le Petit Chaperon rouge, Boucle d’Or, auxquels se joignent les Sept Nains apportant la toilette de bal de Cendrillon. De superbes lustres descendent des cintres symbolisant le Palais de cristal du Prince Ramiro.

La distribution réunie à Nancy témoigne d’une grande homogénéité, et rend hommage avec élégance à la vocalità rossinienne. La Bulgare Violetta Radomirska, toute de grâce et d’élégance, incarne une Angelina au chant parfait qui brille par d’élégantes vocalises (rondo final de grande classe). Défaut de jeunesse je pense, le bas médium manque légèrement de corps dans les ensembles. Luciano Bothelo, voix souple, diction parfaite couronnée par des ut solaires (« Si la ritrova »), est un Ramiro élégant et charmeur.

Les trois clés de fa sont un festival de drôlerie et de chant parfait. Donato di Stefano, possède la rondeur et la couleur idoines pour camper un Don Ramiro bougon. Avec lui Riccardo Novaro (Dandini), superbe de fanfaronnerie dans son air d’entrée, forme un duo parfait qui culmine dans « Un segreto d’importanza ». Nicolas Testé (Alidoro), contre toute attente, se tire honorablement de son air « Là del ciel nell’arcano ».

A la tête de l’Orchestre Symphonique et Lyrique de Nancy, Paolo Olmi offre une direction légère et pleine de contrastes. Le crescendo rossinien est admirablement maîtrisé et repose sur un quatuor léger, où les cordes graves sonnent avec profondeur sans jamais plomber le tissu orchestral. Ce Rossini tout en finesse ne confond jamais vitesse et précipitation, et apporte un soutien d’une grande légèreté à des chanteurs qui peuvent s’exprimer en toute quiétude. Admirablement préparés par Merion Powell, les choeurs réussissent le tour de force d’être toujours en mesure dans une mise en scène qui les sollicite sans cesse.

Bernard Niedda.

Rossini : La Cenerentola – Nancy, Opéra National de Lorraine, 29 novembre 2008

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Photo : DR