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Paris - Compte-rendu : La Sixième autrement
Depuis quelques années, Jukka-Pekka Saraste inscrit à son répertoire les symphonies de Mahler. Des échos flatteurs nous étaient parvenus. Notre confrère Christian Merlin séduit et ému par une 9e Symphonie donnée avec l’Orchestre Philharmonique de Monte Carlo la saison passée avait attiré notre attention sur cette conjonction heureuse. Saraste avait inscrit la 6e pour son concert avec le Philharmonique de Radio France, on y a couru, un peu atterré de voir aussi peu de presse à l’événement et l’on a été littéralement transporté par sa lecture énergique, très tenue, déroulant une narration implacable, animé comme un théâtre sonore.
Une Sixième de haute volée, une des plus incarnées, des plus impérieuse de geste en même temps qu’on ait croisées. Quelques bémols : les transitions du finale ne sont pas encore inscrites dans le flux naturel du mouvement, et alors que tout l’orchestre phrase, concentré comme trop rarement, le pupitre de cors canarde parfois et ne phrase jamais. Hiatus terrible, visible comme le nez au milieu de la figure.
L’engagement du reste de la phalange sidère, notamment les cordes, emmenées par le violon magicien de Svetlan Roussev – ces interventions sont d’un immense soliste qui devrait être en carrière et ne pas se satisfaire du rôle de premier violon même si il le tient avec ce mélange de rigueur et de panache qui n’est qu’à lui. Saraste crée un son mordant, amer, acide, sans pourtant jamais tirer l’œuvre vers un expressionnisme bruyant. Son geste est celui d’un classique, mais la sonorité qu’il produit est résolument moderniste.
C’est l’équilibre de l’œuvre qui est d’emblée trouvé, et parfois jusqu’à ses points de rupture, sensiblement exposés : le Scherzo, placé heureusement en second mouvement, est un exemple remarquable de comment aller assez loin pour exprimer toute la violence de ces pages sans les dénaturer. La poésie millimétrée de l’Andante, ses lumières diaphanes, sa spatialisation sonore, donnaient la main au Nachtmusik de la 7e, rapprochement inédit pour notre oreille, mais défendu par le chef avec un art des couleurs et des textures éclairant. Redisons encore une fois que les musiciens se sont couvert de gloire, et espérons qu’ils reviendront à Mahler avec ce chef, avec pourquoi pas, à la clef, la première intégrale discographique des symphonies selon une phalange française.
Jean-Charles Hoffelé
Orchestre Philharmonique de Radio France, Jukka-Pekka Saraste, Salle Pleyel, Paris, le 30 janvier 2009
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>Programme détaillé de la Salle Pleyel
> Les précédents comptes-rendus de Jean-Charles Hoffelé
Photo : R. Bittner
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