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Paris - Compte-rendu - Philippe Jordan, digne fils d'Armin
Et oui, les bons chefs ça existe. Et heureusement ! Ceux-là n'ont pas besoin de donner dans l'humanitaire pour faire parler d'eux dans les gazettes people... Car les vrais généreux sont discrets, à l'instar de la grande Mado Robin qui après avoir fait vibrer le lustre de l'Opéra dans de mémorables Reines de la Nuit secourait les pauvres de l'après-guerre sans se répandre en interviews sur le sujet. Le bon chef, donc, c'est celui qui porte les orchestres au dessus d'eux-mêmes.
C'est ce qu'a réussi avec autant d'autorité que de simplicité Philippe Jordan, digne fils d'Armin, à la tête du Philharmonique de Radio France tout au bonheur de faire enfin de la musique. Ce dont ont témoigné les applaudissements des musiciens à l'issue de la soirée et leur refus de se lever pour réserver l'un des nombreux saluts à leur jeune chef d'un soir. A 34 ans, Philippe Jordan a tout pour assumer avec panache et surtout avec compétence les fonctions de directeur musical de l'Opéra de Paris à partir de la rentrée prochaine : c'est le choix de Nicolas Joël et il est de bon augure.
Philippe Jordan a entamé vendredi le cycle Bartok/Beethoven que lui a confié la Radio en compagnie de son complice François-Frédéric Guy dans les cinq Concertos pour piano de Beethoven. Le fringant maestro a d'abord témoigné de sa magnifique culture musicale avec deux Images du jeune Bartok encore sous l'influence des mystères debussystes dans En pleine fleur et de la rythmique débridée de Stravinsky dans Danse villageoise. Suit le 1er Concerto de Beethoven recadré dans un moule ultra-classique arraché à tout maniérisme viennois. Au clavier, François-Frédéric Guy se montre virtuose sans ostentation, tenant lui aussi la parfaite balance entre fougue dans le Rondo final et musicalité dans le Largo médian. Il saura prolonger cette atmosphère poétique en bis avec un premier mouvement de la Sonate « Clair de lune » plus méditatif que pittoresque.
Le jeune chef helvète donna toute sa mesure après l'entracte avec le testament musical de Bartok, le Concerto pour orchestre dont les cinq mouvements incarnent la synthèse de la tradition et de la modernité en musique. Tous les pupitres du Philharmonique, toutes couleurs au vent, surent se montrer successivement à la hauteur des exigences du compositeur et du chef, passant de la plainte au rire le plus sarcastique. Triomphe mérité. A suivre les prochains concerts de cette série !
Jacques Doucelin
Salle Pleyel, 6 février 2009
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Photo : DR
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