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Compte-rendu - Acis and Galatea à Beaune - Somptueux hommage à Haendel
Magnifique conclusion au 27e Festival d’opéras baroques de Beaune que l’ « opéra-pastorale » Acis and Galatea, chef-d’œuvre de Haendel dans sa version anglaise. Anne Blanchard, l’âme de la manifestation, a en effet tenu à rendre hommage au compositeur saxon installé à Londres à l’occasion du 250e anniversaire de sa mort. Trois ouvrages lyriques majeurs (Ariodante, Jules César et Rinaldo) ont ainsi été donnés les trois week-ends précédents par de toutes nouvelles formations baroques, tandis que Paul McCreesh et ses Gabrieli Consort and Players, habitués de longue date des juillets musicaux de Beaune, fermaient la marche avec ce divertissement si merveilleusement anglais.
Car ce n’est pas diminuer le moins du monde les mérites de Paul McCreesh que de dire que ce chef n’a pas ajouté une formation baroque de plus outre-Manche, mais qu’il l’a intégrée, insérée avec autant d’amour que de science et de culture à la grande tradition anglaise qui, à l’inverse de ce qui s’est passé en France en raison du couperet culturel de la Révolution, n’a jamais cessé d’être pieusement cultivée, génération après génération, de Purcell à Britten. Il suffisait d’écouter sonner les instruments dans la Sinfonia introductive pour se persuader que c’est bien d’une véritable greffe dont il s’agit ici : loin de ronronner, la tradition s’en trouve rajeunie et exaltée. Le son délicieusement aigrelet des hautbois anciens, bien encadrés par des cordes à la fois libres et stylées, tient alors du clin d’œil pastoral à cette légende à la fois sophistiquée et rustique sortie des Métamorphoses d’Ovide.
Cette manière de « masque » élégant, parfois à la limite du maniérisme, a le fuité d’un bonbon anglais et la subtilité d’un grand thé indien : tous les éléments sont réunis ici pour une dégustation marquée au sceau de la perfection. Cinq chanteurs britanniques hors pair, merveilleusement homogènes, à l’écoute les uns des autres et complices au point d’incarner le chœur de cette bergerie so british, parviennent à paraître naturels dans un sommet de raffinement. Le comble, c’est qu’en dépit de ce jeu distancié, l’émotion réussit à se frayer un chemin au moment même où l’on se croyait dans un simple jeu de colin-maillard… Plus anglais, tu meurs !
La Galatée de l’affriolante soprano Sara Fox a le profil de médaille d’Alma Schindler, épouse Mahler, le buste enserré dans un corset de jais parfaitement destroyed pigeonne avec une insolence à vous damner tous les cyclopes de la Grèce. Et le ramage vaut le plumage ! Quant à son Polyphème, la fabuleuse basse caverneuse Alan Ewing, il crie sa douloureuse passion attisée par le feu de l’Etna avec un art consommé et un réel talent d’acteur. Entre eux, dans tous les sens du terme, s’affairent les trois ténors Robert Murray, somptueux Acis, Jeremy Budd, Damon attentif aux autres, et Tom Philipps, Coridon qui s’essaye à l’impossible médiation. Grâce à Paul McCreesh, cette heure et demie de musique d’une incroyable richesse passe comme un rêve et comme le plus somptueux hommage à Haendel.
Jacques Doucelin
Festival de Beaune, 26 juillet 2009
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