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Jean Gilles (1668-1705), un compositeur à la croisée des chemins

3 Questions à Jean-Marc Andrieu, directeur musical de l’Orchestre Baroque Les Passions

Lancé la saison dernière, le « triptyque Jean Gilles » de l’Orchestre Les Passions et du Chœur de chambre Les éléments, se poursuit le 29 octobre à Toulouse avec Les Lamentations d’un auteur qui ne se résume pas à un l’un des plus fameux requiems de l’époque baroque.

A quoi tient votre attachement à la musique de Jean Gilles ?

Jean-Marc Andrieu : Gilles se situe à croisée des chemins entre la musique française et l’italienne. On trouve chez lui à la fois une verve mélodique toute italienne et le sérieux et la tournure harmonique de la musique française. J’avoue être sensible à ce mélange des genres. Il est dommage que l’on s’arrête souvent au Requiem car d’autres œuvres illustrent autant le talent de ce compositeur.

Le Requiem, que vous avez donné et enregistré(1) la saison dernière, constituait le premier volet d’un « triptyque Gilles ». Le travail autour de cette œuvre vous a je crois conduit à des découvertes intéressantes…

J.-M. A. : Il faut d’abord savoir que le manuscrit original du Requiem a disparu. J’ai fouillé les bibliothèques toulousaines de fond en comble, mais malheureusement il a vraisemblablement flambé à la Révolution. Le Requiem a été beaucoup rejoué et recopié, chaque auteur au fur et à mesure de sa restitution a été tenté d’intervenir sur le langage musical et sur l’orchestration. L’intervention la plus spectaculaire étant l’ajout d’une partie de timbales par Corrette lors de l’exécution de l’œuvre pour les obsèques de Rameau en 1764. L’idée m’est venue de confronter les différentes versions du Requiem dont on dispose pour parvenir, par recoupements, à quelque chose d’aussi proche que possible de l’original.

Lors du concert du 29 octobre, vous dirigerez Les Lamentions. En quoi cette partition se singularise-t-elle ? Comment se terminera le « triptyque Gilles » en 2010-2011?

J.-M.A. : Exception à l’époque baroque en France, cette œuvre présente la particularité d’être conçue comme un grand motet, donc avec une grande formation (chœur et orchestre à cordes), tandis que toutes les Lamentions que l’on connaît sont destinées à la voix soliste et basse continue. Les Lamentations de Gilles traduisent une maîtrise du langage musical étonnante de la part d’un musicien âgé de seulement 24 ans. Le texte des Lamentions de Jérémie présente une théâtralité extraordinaire et aborde vaste gamme de sentiments. Gilles sait utiliser l’orchestre et le chœur pour les exprimer dans toute leur diversité. Nous enregistrons Les Lamentations dans la foulée du concert et le disque sortira au printemps 2010. En complément de programme, j’ai choisi le Motet « Diligame te, Domine », une pièce composée dans la plus pure forme versaillaise. La saison prochaine nous aborderons et enregistrerons le Te Deum et le Motet «Beatus quem elegisti ».

Propos recueillis par Alain Cochard, le 16 octobre 2009

Jeudi 29 octobre – 20h 30
Cathédrale Saint-Etienne – Toulouse
www.les-passions.fr

(1) 1 CD Ligia Digital

www.les-passions.fr

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Photo : DR
 

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