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Britten à quatre - Le Quatuor Diotima à l’Amphithéâtre Bastille
On sait le goût aventureux des Diotima pour les répertoires rares. Au disque ils ont retrouvé les rares quatuors de Lucien Durosoir(Alpha), et magnifié trois quatuors de la maturité de George Onslow(Naïve). Le retour du Billy Budd de Francesca Zambello à Bastille leur permet d’élargir leur répertoire en présentant l’intégrale des quatuors de Britten, chefs d’œuvres de sa musique tout court – aucune page chambriste de Britten n’excepte ce statut – partitions qui jalonnent en un contrepoint subtil la vie du compositeur.
Le Quatuor en ré fut écrit en 1941 lors de « l’exil » américain, alors que Peter Grimes était encore dans les limbes : on reconnaît pourtant dans le 5/4 de l’Andante calmo le pré-écho de son interlude de pleine lune. L’œuvre obtint une distinction de la Bibliothèque du Congrès qui assis considérablement la réputation de Britten dans les milieux musicaux de la cote est (alors même que Britten le composa à Escondido en Californie).
C’est le 250e anniversaire de la mort de Purcell qui vit la création du 2ème Quatuor le 21 novembre 1945. Commentant sa Chaconne Britten confia qu’il avait voulu ressaisir dans des termes et en un lexique contemporains l’esprit du compositeur de Didon et Enée. L’œuvre est tour à tour mystérieuse et fantasque, sa poésie très particulière échappe souvent, et ses caractères sont parfois déconcertants, comme la basse obstinée qui hante le scherzo.
A la fin de sa vie, Britten se relevant avec difficulté d’une sévère opération à cœur ouvert, revint au quatuor à cordes en même temps qu’il travaillait à son ultime opéra, Mort à Venise. D’ailleurs il intitulera son dernier mouvement «Serenissima». Mais la composition de l’opéra l’absorba tant qu’il renonça. Durant l’hiver 1975, il se rendit à Venise et l’idée du Quatuor s’imposa à nouveau, cette fois comme un appendice à l’ouvrage lyrique, omniprésent par ses thèmes dans le finale. La Burlesque est un hommage à Mahler, compositeur que Britten défendit souvent et dirigea parfois, mais c’est l’ombre de Chostakovitch, l’ami indéfectible des dernières années, qui s’impose partout.
Plutôt que d’offrir en complément du triptyque les saveurs ravéliennes d’un autre quatuor écrit par un tout jeune Britten en 1931, les Diotima donneront des pages peu courues de Mozart et de Schubert, mais surtout le 3ème Quatuor de Frank Bridge. Professeur puis mentor de Britten, compositeur avant-gardiste et personnalité mystérieuse mais irréductible, Bridge a considérablement ouvert l’espace harmonique du quatuor dans cette partition écrite en 1926, plus proches des futuristes russes (on pense sans cesse à Roslavets) ou de la Seconde école de Vienne que de la tradition anglaise, l’occasion de découvrir une œuvre de première grandeur et son auteur, l’un des figures majeures de la nouvelle musique européenne de l’entre-deux-guerres (2), l’un des trésors musicaux les plus méconnus de l’histoire de la musique anglaise.
Jean-Charles Hoffelé
Benjamin Britten : Quatuors n°& et n°2. Wolfgang Amadeus Mozart : Quatuor KV 80. Quatuor Diotima
Paris, Amphithéâtre de l’Opéra Bastille, le 26 avril, 20h
Benjamin Britten : Quatuor n°3. Frank Bridge : Quatuor n°3. Franz Schubert : Quatuor n°2.
Quatuor Diotima
Paris, Amphithéâtre de l’Opéra Bastille, le 28 avril, 20h
1) Lucien Durosoir, les trois Quatuors, Quatuor Diotima, un disque Alpha 125 Georges Onslow, Quatuors op 28, 29 et 30, un disque Naïve V 5200
2) Pour en savoir plus sur les quatuors de Britten et de Bridge on peut se reporter au troisième volume de la somme écrite par Bernard Fournier qui vient de paraître aux Editions Fayard : « Histoire du Quatuor à cordes, de l’entre-deux-guerres au XXIe Siècle ».
> Programme détaillé de l’Amphithéâtre de l’Opéra Bastille
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Photo : DR
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