Grande affluence mardi 22 mars à la cathédrale, en ouverture de la Semaine Internationale Francis Poulenc : Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris conviait à la rencontre, inédite, de la Maîtrise de Radio France et de la Maîtrise Notre-Dame de Paris (en formation 16-22 ans, plus quelques supplétifs « adultes » de Notre-Dame), Sofi Jeannin et Lionel Sow, chefs respectifs des deux formations, se partageant la direction alternée d'un programme consacré à la musique française du milieu du XXe siècle.

Deux pages au charme ineffable, « à bouche fermée » (1932), de Jehan Alain (1911-1940) – dont on commémore le centenaire de la naissance – encadraient ce programme : Chanson en ouverture, et « double chœur » depuis les bas-côtés pour un effet magique de poétique lointain ; Fantaisie en fin de concert, les chanteurs quittant les degrés installés sous le grand-orgue pour regagner les bas-côtés, merveilleuse sensation d'éloignement progressif de cette musique aussi structurée que décantée.

Francis Poulenc (1899-1963) et Jacques Chailley (1910-1999) ensuite se répondirent. Du premier, l'on entendit d'abord les Quatre Motets pour le temps de Noël (1951-1952), écriture pure traduisant un climat dense mais confiant, d'une formidable difficulté d'exécution, comme l'ensemble du programme, notamment les nombreuses attaques à découvert des pupitres aigus, vaillamment assumées et laissant d'emblée deviner quel magnifique travail les deux formations avaient réalisé pour fusionner de la sorte. De ces pages a cappella, Poulenc disait : « j'ai sans cesse pensé à Vittoria […], le saint Jean de la Croix de la musique ». La Missa solemnis de Chailley (1947, créée en 1955 au Festival de Besançon sous la direction de Félix Raugel) se souvient elle aussi de la Renaissance et d'une certaine modalité très prisée dans les années 40 et 50 du siècle dernier. Si Chailley parle moins à la première personne que Poulenc, l'œuvre n'en fut pas moins à Notre-Dame une belle découverte : franchise et noblesse des lignes, puissance expressive, équilibre et harmonie – magnifiées par des chanteurs spirituellement engagés.

Un « intermède » fut proposé en tribune, Olivier Latry interprétant le célèbre Prélude et Fugue sur le nom d'Alain (1942) de Maurice Duruflé (1902-1986), une flamme virtuose n'empêchant jamais une bénéfique « retenue », l'articulation à la fois extrême et souple du texte évitant que la musique ne se brouille dans l'immense vaisseau, jusqu'à l'embrasement du tutti final. Poulenc fut ensuite de nouveau à l'honneur : désarmant Salve Regina (1941), puis Quatre Motets pour un temps de pénitence (1938-1939), pendant ardu et tendu – à l'approche de la guerre – et particulièrement émouvant des Motets précédents. Un concert sans effets, pur et intense, hors du temps, suspendu, tant la savante perfection et la poétique droiture de ce répertoire a cappella abolit la notion de durée. Le public reçut le don dans un silence fervent, une vivante et frémissante attention répondant spontanément aux beautés entendues. Simplement magnifique.

Michel Roubinet

Concert des Maîtrises de Radio France et Notre-Dame, cathédrale Notre-Dame de Paris, 22 mars 2011

Enregistré par France Musique, ce concert sera diffusé le 12 avril 2011 (Le concert de midi et demi)

Sites Internet :

Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris – concert du 22 mars 2011
http://www.musique-sacree-notredamedeparis.fr/spip.php?article165

Maîtrise de Radio France
http://sites.radiofrance.fr/chaines/formations/maitrise/accueil/

Maîtrise Notre-Dame de Paris
http://www.musique-sacree-notredamedeparis.fr/spip.php?rubrique4

Semaine Internationale Francis Poulenc
http://www.semaineinternationalepoulenc.com/

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