En peu de temps, le chef russe Vasily Petrenko (36 ans) s’est taillé une réputation à la hauteur de son talent. En poste actuellement à Liverpool, il prendra l’an prochain les rênes du Philharmonique d’Oslo (une phalange qu’a dirigée pendant plus de vingt ans son mentor, Mariss Jansons). Sa rencontre Salle Pleyel avec l’Orchestre Philharmonique de Radio France pénètre au plus profond des bouleversements et des avatars de l’Histoire de la Russie éternelle.

Le Chant des forêts de Chostakovitch (1949) est une œuvre de circonstance, glorification du réalisme soviétique, rarement jouée chez nous. Le contexte idéologique (le reboisement stakhanoviste de l’URSS vanté par le texte édifiant du poète Yevgeni Dolmatovsky) est totalement subverti par la musique fervente d’un compositeur dépassant, par son génie, le caractère obligé d’un oratorio à la gloire du socialisme stalinien. Chœur et orchestre sont soulevés par les gestes amples et la direction communicative de Petrenko capable, par son pouvoir magnétique, de soulever des montagnes. On notera les interventions du baryton Sergei Leiferkus, très engagé malgré le caractère émacié de son timbre et celle du valeureux ténor Dimitri Voropaev. Une curiosité sommes toutes qui, sans être majeure, n’en méritait pas moins cette résurrection dans l’Hexagone.

Les deux Suites extraites du ballet Roméo et Juliette sont rendues avec une violence, une puissance, une souplesse mais aussi une poésie d’une tendresse impalpable (Roméo et Juliette avant la séparation). Du grand art où le Philhar se montre sous son meilleur jour. Les musiciens manifestent d’ailleurs, à la fin du concert, leur enthousiasme à l’égard d’un chef si prometteur.

Michel Le Naour

Paris, Salle Pleyel, 10 février 2012

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Photo : DR