Deux options s’offrent au programmateur d’un festival d’envergure comme les Wiener Festwochen qui se tiennent chaque année à la fin du printemps dans la capitale autrichienne : la redécouverte d’ouvrages rares ou le prestige international dans le répertoire. Le premier créneau étant celui du Theater an der Wien, qui accueille la production lyrique de la manifestation, c’est donc vers la seconde solution que s’est tourné Luc Bondy, initiant sur plusieurs années un cycle Verdi.

La Traviata de Deborah Warner qui échoit dans un sanatorium à la blancheur clinique et aux médecins à l’humanité chirurgicale reprend ainsi à son compte les standards établis de l’interprétation du destin de Violetta, sur fond de statiques décors de quatre saisons imitant la progression chronologique de l’histoire.

Affaiblie par rapport aux soirées aixoises qui l’avaient révélée au public français, Irina Lungu se raccroche à la dimension théâtrale de la courtisane et à la vaillance de son Alfredo, Saimir Pirgu. Mais c’est bien le Germont de Gabriele Viviani qui retient l’attention, dispensant une aura qui fait de la rencontre avec la maîtresse de son fils le point culminant de la soirée – exactement l’inverse des représentations rémoises du mois dernier. Outre un sens du style consommé, le baryton italien confère au personnage une jeunesse et une luminosité inattendues. Après tout, Alfredo n’ayant que vingt ans, Giorgio Germont peut bien n’en avoir que le double, et le rôle comme la partition ne requiert pas les barbons que l’on engage parfois. Il le reprendra à Barcelone prochainement, et, on l’espère, sur une scène française. Le reste du plateau accomplit son office, tout comme le poulain de Daniel Barenboim, Omer Meir Wellber, qui partage avec son mentor un goût pour une accentuation non-conventionnée parfois brutale.

Gilles Charlassier

Verdi : La Traviata – Vienne, Autriche, Theater an der Wien, 2 juin 2012

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Photo : DR