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J. DiDonato en récital au TCE - Joyce à Venise - Compte-rendu
Invitée régulière des « Grandes voix », Joyce DiDonato a une fois encore prouvé son ascendant sur le public parisien avec un récital construit sur le thème éternel de Venise. Débuté et clos avec Vivaldi, musicien vénitien par excellence, tout d'abord par deux airs lents et méditatifs d'Ippolita issus d'Ercole sul Termodonte chantés avec la même délectation que dans l'intégrale dirigée par Fabio Biondi (Virgin 2010), puis un admirable « Sposa son disprezzata » d'Irene dans Bajazet, dont la mélancolie ruisselante et les pianissimi aériens sont désormais ceux d'une soprano, la soirée offrait un parcours français, italien, allemand et américain de très belle tenue.
Joliment interprétées, les Cinq mélodies de Venise de Fauré soulignent les mystères de la cité lacustre, les amours voluptueuses et les ombres glissant sur la lagune, dans un style « fin de siècle » très personnel, qui correspond à la sensibilité de la cantatrice dont le français est fort compréhensible. Pétulante pour dépeindre les frasques de la jeune vénitienne Anzoleta pour le gondolier Momolo, Joyce DiDonato restitue cependant moins parfaitement qu'Anna Caterina Antonacci récemment à l'Opéra Comique, le dialecte mis en musique par Rossini dans ces extraits des Péchés de vieillesse, par ailleurs très bien saisis par le pianiste David Zobel.
La vision froide et sombre de Schubert (Gondelfahrer) et de Schumann (Zwei Venetianische Lieder), était heureusement suivi par un cycle de trois mélodies signé Michael Head, composé pour Janet Baker, à l'inspiration mélodique modeste, mais d'une élégante facture et d'une justesse d'évocation plaisamment relevée par la musicienne. Venezia de Hahn, malgré son exécution raffinée, sa verve et sa caractérisation, reste inférieure au souvenir laissé là encore par Antonacci, capable d'instiller aux mots – ici souvent mangés – une coloration et une densité populaire sans doute plus proche de la réalité, que le résultat obtenu par la cantatrice américaine.
En acceptant de bonne grâce de donner en bis le rondo de Cenerentola « Non piu mesta » où elle est sans rivale, Joyce DiDonato s'éloignait déjà de cette Venise mythique, mais qui aurait osé s'en plaindre tant cette aria aux vocalises échevelées lui colle à la peau, le public sous le charme accueillant à bras ouverts l'exemplaire interprétation de « Somewhere over the rainbow », immortalisé par Judy Garland dans Le magicien d'Oz de Cukor en 1939.
Ceux qui n'ont pas pu assister à ce récital pourront se consoler en retrouvant Joyce DiDonato en DVD dans une irrésistible Cendrillon de Massenet, réalisée à Londres en juillet 2011, et en CD, dans une intégrale de Dead man walking de Jake Heggie, captée l'an dernier à Houston (Virgin).
François Lesueur
Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 26 juin 2012
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Photo : Nick Heavican
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