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Le San Francisco Ballet au Châtelet - La corne d’abondance
Incontournable pour qui veut se faire une idée de ce qu’est devenu le ballet néoclassique dans la 2ème moitié du XXe siècle et le début du XXIe siècle, voici grâce au San Francisco Ballet, une brillante sélection de pièces maîtresses de grands chorégraphes anglo-saxons, lesquels ont si fortement marqué la danse que l’on prononce encore le nom du New York City Ballet, par exemple, avec une sorte de respect sacré, même si la compagnie n’a plus toutes les qualités de sa grande époque, alors que George Balanchine y régnait en maître. A côté de cette compagnie prestigieuse et fixe, deux autres grandes compagnies américaines à vocation nomade, courent les Etats Unis et le monde : l’American ballet Theater, dont Barychnikov et d’autres grands russes échappés de leurs murailles firent les belles heures, et aujourd’hui, la plus ancienne de ces forteresses du chausson, le San Francisco Ballet. Invité par les Etés de la Danse, il s’installe au Châtelet du 10 au 26 juillet.
Helgi Tomasson © David Allen
Dirigée par l’islandais Helgi Tomasson, qui fut un grand danseur, la troupe est magnifique, le répertoire d’une incroyable variété et d’un bel éclectisme: Balanchine y figure au tout premier plan, mais aussi Robbins, plus subtil sinon plus complexe, et qui paraît incontestablement moins démodé, car il ne prétend qu’à émouvoir et charmer en finesse. Tous deux portent la marque indélébile du rêve américain. Mais la compagnie fait aussi appel à des chorégraphes du vieux continent, comme Mac Millan, Ashton et Van Manen pour le passé, outre les Morris, McGregor et Wheeldon qui font le ballet anglo-saxon d’aujourd’hui, sans parler des Scarlett, Lian, Kobborg et Possokhov, nouveaux venus. Ouverture aussi sur un autre monde en légèreté, avec Ratmansky, dont on a récemment savouré la Psyché à l’Opéra de Paris.
On verra donc tout cela, en 18 représentations où les titres alternent, et on admirera la puissance mondialiste d’un art si codé qu’on l’a cru menacé de disparaître. En essayant de ne pas manquer, les 12, 19 et 21, le sublime chef-d’œuvre qu’est In The Night de Robbins.
Juste une question à l’énoncé des noms des solistes principaux : sur quinze, deux seulement sont nés aux Etats-Unis. Serait-ce que ceux-ci n’ont pas suffisamment de grandes écoles de ballet pour y puiser leurs propres servants, ou préfèrent ils que le monde vienne à eux ?
Voici donc à l’assaut de ce bastion classique où chacun trouve son compte, et le public en premier, Cuba et le splendide Joan Boada, vedette internationale, l’Arménie avec David Karapetyan, la chinoise Yuan Yuan Tan, l’estonien Tiit Helimets, outre le quota de russes incontournable, et la fine Mathilde Froustey, échappée de l’Opéra de Paris, qui n’a sans doute pas su retenir son lyrisme délicat et ses bras fluides. On se réjouit aussi que toute cette session, complétée de films et de cours publics, soit accompagnée par l’Orchestre Prométhée, dirigé par Martin West, directeur musical du SFB. Même s’il ne s’agit pas de la Philharmonie de Berlin, la présence de musiciens est tellement plus chaleureuse qu’une bande, si prestigieux en soient les interprètes !
Jacqueline Thuilleux
San Francisco Ballet / Les Etés de la Danse
Les 10, 11, 12 (à 15 et 20h), 14, 15, 16, 17, 18,19 (à 15 et 20h) 21, 22, 23, 24, 25 & 26, (à 15 et 20h) juillet 2014.
Paris – Théâtre du Châtelet
www.lesetesdeladanse.com / www.chatelet-theatre.com
Photo © Eric Tomasson
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