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L’Amico Fritz de Mascagni à l’Opéra national du Rhin – Une idylle alsacienne - Compte-rendu
A mille lieues de l’atmosphère vériste de Cavalleria Rusticana (1890), la comédie lyrique L’Amico Fritz – composée en 1891 sur un livret de P. Suardon inspiré du roman éponyme des deux Lorrains Erckmann et Chatrian – privilégie l’intimisme sur les grandes envolées dramatiques.
© Alain Kaiser
Signée Vincent Boussard, la production de l’Opéra national du Rhin met en valeur la psychologie des personnages d’une idylle simple où un riche fermier, célibataire endurci, succombe sous l’influence de ses amis aux charmes un peu naïfs d’une jeune campagnarde de son entourage. Les décors sans sophistication (un mur foncé en fond de scène, une table pour les agapes, une vidéo d’arbres en fleurs symbolisant l’amour…) nous transportent dans un cadre villageois (des poules en chair et en os picorent dans la cour de ferme) et les changements se font à vue. La direction d’acteur ne recherche pas non plus la complication ; les costumes signés par Christian Lacroix apportent en revanche une note un peu décalée par la richesse des tissus et la brillance des drapés. Seule la présence de la servante en costume folklorique alsacien se réfère au contexte (bien que l’œuvre se déroule dans le Palatinat au XIXe siècle).
La musique de Mascagni, de belle texture - la finesse de son orchestration préfigure parfois celle de Nino Rota - bénéficie de la direction vive et précise de Paolo Carignani, véritable cheville ouvrière du spectacle. Le chef italien réussit à donner une unité à une partition qu’il porte à bout de bras (superbe Intermezzo à l’acte III). Les Chœurs de l’Opéra national du Rhin et les instrumentistes de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, en pleine forme, sont sans cesse tenus en haleine.
© Alain Kaiser
Le ténor roumain Teodor Ilincai incarne le propriétaire foncier Fritz Kobus avec vaillance, mais montre des limites dans l’émission par sa voix parfois engorgée. A son côté, Brigitta Kele ne manque ni de passion ni de projection dans le rôle de la jeune Suzel, et il faut accorder une mention particulière à Elia Fabbian, excellent en rabbin David, timbre profond et ligne de chant très stable. Anna Radziejewska campe la tzigane Beppe avec beaucoup d’entregent - et ne manque pas son effet quand elle descend des cintres tel un ange baroque.
Public enthousiaste pour accueillir un spectacle sans prétention qui aura a eu le mérite de remettre au goût du jour un Mascagni méconnu
Michel Le Naour
Mascagni : L’Amico Fritz - Strasbourg, Opéra national du Rhin, 24 octobre. Prochaines représentations à Strasbourg les 28 octobre, 5 et 7 novembre ; à Mulhouse les 21 et 23 novembre 2014. www.operanationaldurhin.eu
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